Extrait du compte-rendu de la session par Joseph Bazola

Comme promis, les 12 « mamans » étaient présentes lors de cette première journée de formation, à savoir Chancelvie N., Ferolle N., Gilberte M., Agathe N., Honorine B., Laurette M. , Marlena B., Mathilde S., Norcella D., Romagisse Z., et Sandrine M.

Françoise a d’abord rappelé aux « mamans » l’emploi du temps de la formation qui s’étale sur 6 mois. Puis elle a demandé à Clara de faire la lecture du cas Marguerite et de le traduire.

Le cas de Marguerite
Marguerite est contente par ce qu’elle vient de recevoir 50 000 F de FAFA pour monter une activité.
Lundi matin : elle achète 2 sacs de foufou pour 50 000 F. Elle a de la chance, le prix du n’est pas très élevé. Elle a emprunté 10 000 FCFA à son compagnon pour payer le transport du foufou jusqu’au marché et tous les autres frais (le moulin, la taxe, la location de la table.) Elle a tout prévu, les emballages et les boites pour mesurer.
Sur le marché, Marguerite est en pleine forme, son stand est joli et bien présenté, et elle vend bien. Le jeudi soir, elle a presque vendu tout le foufou* et, dans sa caisse, elle a la coquette somme de 67 000 F. Le vendredi, elle vend encore pour 20 000F. La voilà avec 87 000 F dans sa caisse.

En rentrant le soir, elle ne peut « se contenir de joie », et elle achète un beau poisson frais pour 5 000 F, des sandales pour les enfants qui n’en ont plus (3000 F), et pour plaire à son homme, un « tissage » (tresse qu’on ajoute à ses cheveux) à 5 000 F.

Marguerite n’a pas compté, mais elle vient déjà de dépenser 13 000 F. Samedi Matin, elle fait son grand marché et dépense 5 000 F pour la maison. Comme c’est la fin du mois, et qu’elle a un peu d’argent, son mari lui demande de payer la moitié de la location de la maison soit 15 000 F, et de lui rembourser les 10 000 F qu’elle lui a empruntés.

Et voilà ! Marguerite a déboursé 13 000 F vendredi soir (car elle n’a pas pu « se contenir »), b) 5 000 F pour le grand marché, c) 25 000 F rendus à son mari pour le loyer et sa dette, soit un total de 43 000 F. Le lundi matin, elle regarde dans sa caisse et il ne reste que 44 000 F.
Catastrophe, elle ne pourra pas acheter 2 sacs de foufou

Sacs de foufou – *A Brazzaville, le foufou est préparé à partir de farine de manioc

Après la lecture, Clara a demandé à une « maman » d’aller au tableau. Ensuite Françoise a demandé aux femmes de réfléchir à l’erreur que Marguerite avait commise dans cette première semaine.

Pour Chancelvie, l’erreur de Marguerite est d’avoir commencé à faire les dépenses le vendredi soir sans compter. Mathilde a ajouté qu’elle aurait dû noter quelque part ce qu’elle faisait comme dépenses, que chaque dépense devait faire l’objet de calcul.
Mais pour Agathe, il est clair que Marguerite  aurait dû renouveler son stock dès que son premier sac était fini, c’est à dire le vendredi matin. Gilberte, quant à elle, a déclaré que renouveller son stock au bon moment, c’était vraiment très important, tout comme le suivi précis des dépenses.

Une longue conversation a suivi le travail sur le cas, et il semble bien que les participantes aient intégré ces deux dimensions : la nécessité d’être attentive à son niveau de stock de marchandise, et celle de toujours noter les dépenses réalisées en cours de journée afin de ne pas avoir de mauvaises surprises.
Notre expérience nous permet d’affirmer que les femmes comprennent très bien – et très vite – la nécessité de tenir leur stock à jour, et de ne pas attendre pour le renouveler, notamment dans les conditions économiques très tendues qu’elles doivent gérer. En revanche, noter scrupuleusement dépenses et recettes est une pratique bien peu répandue sur les marchés de Brazzaville. Une grande partie du travail qui commence pour ce nouveau groupe doit amener les « mamans » à bien mesurer l’intérêt qu’elles auront à posséder des informations précises sur leur activité.